venue d'un visage 2
Venue d'un visage (2)
Puissant, incontournable, l'air gagne en densité. Le temps aussi. Il se penche, se contracte, tout en frémissements et légère fusion organique. Entre nous les mots tombent chacun de leur côté, bouches cousues, sens par dessus tête. Plus rien d'autre ne peut arriver que l'agitation des rouges mordus d'impatience en bordure des lèvres.
La balance des bras au sommet de nos souffles; la perte du réel dans chacune de nos brillances. Et tous nos jours rassemblés, inséparables; la lenteur de l'histoire où demeurer enfin sans que rien n'aille jamais plus vite qu'un vertige étendu, sans terre et noyé de galaxies.
Venue d'un visage (2)
Avec entre nous des instants immobiles vastes dans leur luminescence, des choses adoucies pour que plus rien ne bouge, avec des plus et des encore bien clairs et bien présents, des passages créés autour de chaque sourire possible, des paroles ouvertes et inédites qui font route commune, des rapprochements qui chassent très loin leurs terrains vagues, des vagues qui s'en viennent et souhaitent tout donner, des écoutes en tous sens sauf celui qui interdit. Des et des et tous les contes divers façonnés en douceur dans nos fondations communes.
Venue d'un visage (2)
Parfois les mots s'échappent, se tiennent, se retiennent, phrases serrées des étreintes, jeux des sens mêlés en tous sens, construction foisonnante des divers passe-passe, en pousse-muraille. Le mur alors en croissance vibrante, une chaleur qui se dresse, lie comme un ciment; le mur alors germe de maison, construction, oui, arrêt de construction aussi, plus tard. Déconstruction à grande hauteur de briques. Mots déviant qui se défient, défigurent, la sape des cicatrices, les ruptures multiples, l'ouverture des plaies. Le mur demeure mur sans mûrir sur ses racines; immature, froid, seul, seulement cerné par les séparations, pour n'être que séparation.
Enchaînement de nos dispersions dans l'épaisseur des signes; cercles incessants qui nous mènent de leur vol dérivant à travers les mots les images. Cet intérieur du temps nous serre de près, fait toujours s'effondrer à la longue nos distances les plus minimes. C'est lui qui choisit pour nous les lieux l'imprévisible de notre fragilité.
Venus d'un visage (2)
Ce mur en nous, entre, autour, ce mur de pierres tombales avec sa grande bouche noyée dans la crue du silence. D'une pointe sèche de cri pouvoir libérer les paroles, les paroles des regards, les miens, les tiens; desserrer les dents noires des barreaux, les dents noires de l'intérieur. Qu'on entende... Il reste, c'est sûr, de nouvelles bouches à creuser en mots solides, bien soudés, où nous pourrons marcher à deux.